La maison dite de la Reine Blanche a été reconstruite après 1487 par un échevin de Bourges, Ursin de Sauzay dont on a vu les armoiries dans l'hôtel des Échevins. Il choisit une construction en bois car c'est plus rapide à bâtir avec des murs en torchis ( mélange de paille et de terre glaise ) qu'une maison en pierre, et aussi beaucoup moins cher. Pour lutter contre l'incendie, des murs pare-feu en pierre isolent de la maison voisine, le toit est recouvert de tuiles en terre cuite ou d'ardoises à la place du chaume ou des tuiles en bois, les encorbellements sont rétrécis. Pour montrer qu'il est un notable, il fait sculpter différents ornements sur les pans de bois: en bas des sujets religieux alors qu'en haut les personnages sculptés s'amusent, dansent la bourrée et jouent de la cornemuse; un gros moine joufflu semble être une critique de certains membres du clergé; le décor est gothique avec des arcs en accolades et des choux frisés.
Rue Mirebeau et place Bascoulard, on a observé deux maisons jumelles avec le pignon sur rue pour gagner de la place au sol. Cette faible occupation au sol est compensée par la construction en hauteur et l'étage est en encorbellement pour gagner de la surface. Au rez de chaussée, il y avait la boutique avec un ouvroir et le comptoir donnant sur la rue. Dans l'arrière boutique, il y avait l'atelier et une salle en pierre appelée la salle du trésor ou garde robe pour mettre les biens précieux à l'abri d'un autre incendie. Le mur pare-feu est présent ici aussi. Le logis était à l'étage. Il existe différents types de colombages : en losange, en croix de saint André, en grille et en arêtes de poisson (ce dernier type est très rare à Bourges). Les propriétaires les plus riches faisaient sculpter les pans de bois, parfois pour rappeler leur métier comme sur la maison du vigneron Houet, ou les trois flûtes au début de la rue Bourbonnoux, parfois c'était simplement décoratif comme les deux têtes de dragons avalant la poutre ou le dais sculpté au coin de la rue des Juifs.
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Les fausses fenêtres avec des personnages sculptés rappellent celles où Jacques Cœur et sa femme étaient représentées. Ici, ce sont des gardes armés qui sont figurés et qui évoquent la mission des échevins : assurer la sécurité de la ville contre les agressions mais aussi l’incendie. Sur le tympan de la porte de la tour est sculpté un écu porté par deux anges et entouré d’un collier de coquilles Saint-Jacques, celui de l’ordre de Saint-Michel, représentant les armes de la monarchie française. Les échevins rendent ainsi hommage au roi dès l’entrée. En s’approchant du décor végétal sculpté, on s’aperçoit que les feuilles qui, ornent les arcs ne sont pas les habituelles feuilles de choux frisés, mais des feuilles de chardon, ce qui s’expliquera plus tard. Nous arrivons dans une pièce, la salle du conseil où le maire et les échevins prenaient leurs décisions. Cette salle voûtée en pierre servait aussi à conserver les archives à l’abri de l’incendie. Sur la cheminée est inscrit en latin la devise du maire et des échevins (« ……… CONCORDEM REGIMUS URBEM ») : « Toujours unis pour gouverner la ville avec concorde ». Les écus peints sont ceux d’un des maires de Bourges et de ses quatre échevins. Les écus sont surmontés de heaumes de chevaliers, signes de la noblesse, car les échevins de Bourges étaient automatiquement anoblis. Cette fonction municipale était donc très recherchée par la haute-bourgeoisie berruyère qui pouvait ainsi accéder à l’ordre supérieur de la noblesse. Au-dessus, on remarque le blason de Bourges avec trois moutons, que l’on retrouve aussi peints à la voûte. Dans la grande salle d’à côté, on remarque encore le blason de Bourges mais cette fois sculpté sur une console supportant une poutre. Des moutons sont encore représentés sur le manteau de la cheminée avec un berger et une bergère tenant un écu . Leur omniprésence s’explique par l’importance de cette activité économique. En effet, au Moyen Age, l’élevage du mouton était la principale activité dans la campagne berruyère comme le montre cette vue de Bourges par Hoefnagel en 1562. La laine était ensuite travaillée par les artisans de Bourges pour en faire des draps de laine qui se vendaient jusqu’en Italie et même en Orient par les galées de Jacques Cœur. C’est donc grâce aux moutons que Bourges s’était enrichie. Autrefois, on brossait la laine avec des chardons pour l’opération du cardage, ce qui explique sûrement la présence de ce décor végétal sculpté plutôt que celui des traditionnelles feuilles de choux. Les fleurs de lys ont disparu du manteau de la cheminée et des autres sculptures qui ont été bûchées lors de la Révolution française. Le tympan et le décor entourant la porte est finement sculpté et bien conservé. Au centre, une bergère en train de filer la laine; à gauche, un enclos de moutons et à droite, deux hommes se battant. Cela peut symboliser la municipalité de Bourges (la bergère) qui veille sur la sécurité du troupeau (les habitants) en évitant la discorde (les bagarreurs), ce qui rappelle la devise vue dans la salle du conseil.
La famille Cœur en profite pour faire du commerce avec le roi et sa cour installée à Bourges. Le roi semble apprécier Jacques Cœur puisqu'il lui confie en 1427 la frappe des monnaies ( Jacques Cœur en profite pour détourner du métal précieux mais le roi lui pardonne), le nomme Argentier, c'est-à-dire fournisseur exclusif du roi et de sa cour, en 1439. Vers 1440, il l'anoblit et en fait son conseiller, puis son ambassadeur en 1447. En 1443, Jacques Cœur achète un vaste terrain sur le rempart gallo-romain pour faire construire un hôtel particulier qu'il appelle sa "grant maison" et que l'on nomme aujourd'hui le palais Jacques-Cœur car il est digne d'un prince. Sur la façade, on aperçoit ses emblèmes, la coquille saint-Jacques et le cœur, sa devise, "à vaillans coeur riens impossible" qui signifie qu'on peut tout réussir lorsque l'on est courageux, une sculpture de Jacques Cœur et de sa femme dans des fausses fenêtres. Jacques Cœur rend aussi hommage au roi Charles VII qui lui a tant donné, avec une fleur de lys sculptée à la fenêtre de la chapelle et une niche en dessous qui abritait la statue du roi à cheval. Elle a disparu sûrement à la Révolution de 1789 mais une miniature de la fin du XVe siècle prouve son existence (Munich, ms 10.103, fol.148v°-149). La grande salle de réception est appelée la salle des festins car elle était destinée à faire des banquets avec une tribune pour les musiciens, une grande cheminée, un passe-plats. Pour rendre hommage au roi, un cerf ailé, des fleurs de lys, des roses et des iris, emblèmes de Charles VII, sont sculptés sur la cheminée et le tympan de la porte.
Dans la chambre des galées, on a découvert l'origine de son immense fortune estimée à 600 000 écus d'or, la moitié du budget du royaume ce qui équivaudrait à deux cents milliards d'euros aujourd'hui (seulement 70 millions d'euros au cours de l'or), donc ce qui ferait de Jacques Cœur une personne plus riche que Bill Gates, l'actuelle première fortune mondiale. Dans la chambre des galées, se trouve un vitrail représentant une galée ayant appartenu à Jacques Cœur, tout comme sur une sculpture au tympan de la porte. Ces bateaux, et la carte, montrent comment il a fait fortune dans le commerce international avec Damas et Alexandrie.
Dans son hôtel particulier, il y a aussi une très belle chapelle, toute peinte de blasons, de cœurs, de coquilles Saint-Jacques, de sa devise, de fleurs de lys et d'anges au plafond. Jacques Cœur y a son oratoire, tout comme sa femme, Macé de Léodepart Jacques Cœur n'a pas vraiment profité de son magnifique hôtel particulier car il est arrêté, sur ordre du roi, en 1451. Il était devenu trop puissant aux yeux de certains, jalousé par beaucoup, notamment par tous ceux qui devaient lui rembourser leurs emprunts. Le roi efface ainsi ses dettes et lui confisque tous ses biens. En 1453, Jacques Cœur est condamné à la prison à perpétuité. Il s'en évade l'année d'après et rejoint le pape à Rome. Ce dernier le protège et lui confie la mission de partir en croisade contre les Ottomans qui viennent de conquérir Constantinople. Il meurt en chemin, sur l'île de Chio en 1456.
Une vie digne d'un roman pour notre célèbre berruyer qui a mis en pratique sa devise "A cœur vaillant, rien d'impossible", devise encore valable aujourd'hui, car avec du courage tout devient possible, même au collège... Nous avons visité les Archives départementales du Cher où sont conservés des milliers de documents dont les plus anciens datent du Moyen Age. Mme Givert nous a expliqué la mission de conservation des Archives en nous montrant le passage du papier kraft aux boîtes d’archives Cauchard, standards, en carton neutre, solides et opaques. Les documents ont tous une cote pour être classés, inventoriés et retrouvables lorsqu’on voudra les consulter. Ces boîtes sont entreposées dans des magasins à l’abri de la lumière où la température et l’hygrométrie sont contrôlées. Les étagères sont mobiles et s’actionnent facilement (nous avons testé) en tournant la manivelle. 10 kilomètres de documents sont ainsi conservés dans un silo et les Archives du Cher ont jusque-là construit trois silos (ce sont ces cubes en briquettes de Saint-Palais que nous apercevons de l’extérieur), mais ce chiffre est amené à augmenter car tous les ans de nouveaux documents sont collectés. C’est pourquoi le centre des Archives a quitté le centre-ville pour s’installer sur un vaste terrain auprès du lac d’Auron. Une autre mission des Archives départementales et patrimoine du Cher est de faire connaître le patrimoine du Cher. C’est ainsi que nous avons découvert quelques pièces essentielles et uniques du patrimoine écrit, en rapport avec le duc Jean de Berry et la Sainte-Chapelle de Bourges. La bulle originale du pape Clément VII qui a autorisé la fondation de la Sainte-Chapelle en 1392. Elle est classée sous la cote 8G 1447. Le parchemin est scellé par un sceau en plomb en forme de bulle, ce qui certifie que ce document a été approuvé par le pape. C’est pour cela qu’on parle d’une bulle papale ou pontificale. Le duc Jean de Berry tenait à avoir l’autorisation de la personne la plus importante chez les chrétiens, le pape, ce qui lui apportait une caution supplémentaire. Le texte en latin nous dit que le duc Jean voulait « construire dans son palais de Bourges une chapelle solennelle à l’instar de la chapelle royale de Paris… ». Cette source historique prouve que Jean de Berry voulait se comparer au roi de France et notamment au fameux Louis IX, dit Saint-Louis, qui avait fait construire la Sainte-Chapelle de Paris. Le document suivant (8G 1621) est un dessin du profil de la Sainte-Chapelle de Bourges fait à la fin du XVIIe siècle à l’appui d’un devis de reconstruction du clocher suite à l’incendie de 1693. La charte de fondation de la Sainte-Chapelle de Bourges était un document de plus de 2 mètres de haut, illustrée par un frère Limbourg dans l’initiale J historiée où l’on aperçoit le duc Jean de Berry. Cette charte a brulé dans l’incendie du Palais en 1858. Heureusement, il nous reste ce fac-similé (J 771), copie conforme d’une partie du document original. Il a été réalisé en 1838 et nous permet d’admirer cette écriture calligraphiée qui rappelle celle de Jean Flamel sur l’ex-libris du Catholicon vu précédemment à la bibliothèque des Quatre-Piliers.
Enfin, nous avons visité la magnifique exposition présentée par Jean Chen, un artiste berruyer, aux Archives du Cher jusqu’à la fin du mois de janvier. Après un travail d’historien pour collecter toutes les sources iconographiques connues, Jean Chen a dessiné des vues de Bourges vers 1500 sous des angles totalement inédits qui nous font découvrir notre ville sous un nouveau jour. Merci à Mme Givert et aux Archives départementales du Cher pour cette intéressante découverte.
La Sainte-Chapelle de Bourges a été construite à partir de 1391-1392 par le duc Jean de Berry qui voulait imiter Saint-Louis (Louis IX) et la Sainte-Chapelle que ce dernier avait fait construire à Paris (photos ci-dessous). La Sainte-Chapelle de Bourges était collée perpendiculairement au palais du duc Jean. C'était donc une chapelle palatine. Elle peut porter le titre de Sainte-Chapelle car y étaient conservées des reliques de la Passion du Christ et de plus, le duc Jean de Berry est de famille royale. Jean de Berry s'était fait sculpter un magnifique tombeau en marbre décoré d'un gisant et de nombreux pleurants pour être enterré dans sa Sainte-Chapelle. En 1757, la Sainte-Chapelle est endommagée par une tempête. L'archevêque de Bourges, jaloux de l'indépendance de la Sainte-Chapelle qui dépendait directement du pape, exagère le montant des dépenses pour qu'elle ne soit pas réparée. Finalement le roi de France Louis XV décide alors de la détruire. C'est pourquoi on ne peut plus la voir aujourd'hui. Heureusement, certains vestiges ont été conservés au musée du Berry où nous avons pu les admirer : - dix pleurants qui sont des chefs-d’œuvre de la sculpture gothique.Ils décoraient le tombeau du duc Jean qui avait engagé les meilleurs sculpteurs, notamment Jean de Cambrai.Les sculpteurs ont réussi des œuvres très précises où les visages ou l'attitude expriment la tristesse. On y voit les rides, les pages d'un livre, les grains du chapelet. Les pleurants sont sculptés dans le marbre ou l'albâtre et pourtant les plis paraissent réels et ressemblent à du tissu. Ils sont tellement beaux qu'ils sont estimés à 2 millions d'euros l'unité suite à la vente aux enchères d'une collection privée, il y a deux ans. Les autres pleurants sont dispersés dans le monde : les musées de New York, de l'Ermitage à Saint-Pétersbourg, au Louvre à Paris, au château de la Verrerie dans le Cher et d'autres sont dans des collections privées. On parle de 27 pleurants au total. - cinq grandes statues de prophètes et des têtes d'apôtres qui devaient se situer dans la nef comme le prouve deux miniatures peintes par Jean Fouquet et par Jean Colombe -la tête du duc Jean qui était auparavant sur le priant conservé dans la cathédrale. Elle était tellement abîmée qu'elle a du être remplacée. On distingue malgré tout son large visage qui ressemble a celui que l'on a déjà vu dans ses miniatures et le gisant. Il porte sa couronne de duc. - une maquette du XVIIIe siècle - des morceaux de vitraux mais les plus beaux vitraux sont conservés dans l'église basse de la cathédrale. A la cathédrale, sont donc conservés les vitraux mais aussi: - le gisant en marbre du duc Jean - des priants représentant le duc Jean et ses deux femmes successives en prière - une sculpture de la vierge dans la chapelle axiale Au palais Jacques-Cœur : - la reconstitution en plâtre du tombeau du duc Jean que nous photographierons au mois de janvier A la bibliothèque des Quatre-piliers:
-six manuscrits enluminés provenant de la Sainte-Chapelle dont nous avons déjà parlé dans un précédent article. Merci à Émeline Daniel pour cette intéressante visite du musée du Berry Nous avons eu la chance et le privilège d'admirer, grâce à M. Tranchida, directeur de la bibliothèque des Quatre-Piliers de Bourges, des manuscrits enluminés qui ont appartenu au duc Jean de Berry. Ce sont les six manuscrits encore conservés à Bourges que le duc Jean avait donnés à la Sainte-Chapelle de Bourges. Il possédait beaucoup d'autres livres mais ils ont disparu pour la plupart, parfois dans des incendies. Il en reste quelques uns en dehors de Bourges : à Chantilly (les Très riches Heures du duc de Berry), à New York, à Paris... Ces manuscrits de plus de 600 ans sont conservés dans des boites sur-mesure pour être à l'abri de la lumière, de l'humidité, de la poussière et des insectes. Ils ont été fabriqués avant 1416, année de mort du duc Jean avec des matériaux de qualité : les pages sont en parchemin c'est à dire en peau de bête, les reliures sont en bois recouvert de cuir ou de tissu, avec des fermoirs et des cabochons, de l'encre et la peinture en pigments naturels, de la feuille d'or ou d'argent pour faire briller, pour enluminer. Ces livres étaient écrits à la main (en cas d'erreur, il fallait racler le parchemin) par des moines-copistes dans des scriptorium et les miniatures étaient peintes par des peintres-enlumineurs comme les frères Limbourg. Pour réaliser les plus grands formats, il fallait jusqu'à 200 peaux de bêtes pour un seul manuscrit pouvant peser 30 kg. Le premier livre, du début du XVe siècle, est l’Évangéliaire de la Sainte-Chapelle qui commence, sur le premier feuillet, par une miniature représentant les 4 évangélistes (de gauche à droite, de haut en bas) : Jean, Mathieu, Marc et Luc. L'écriture est gothique et en latin (beaucoup plus difficile à transcrire que l'écriture caroline). Les marges sont décorées d'enluminures avec notamment les emblèmes du duc Jean de Berry : l'ours, le cygne, les lettres E et V, et les fleurs de lys. Au folio 181, on voit le duc Jean en prière devant saint André, son saint patron parce qu'il était né le 30 novembre, jour de la Saint-André. Jean de Berry aimait se faire représenter en peinture dans ses manuscrits. Le deuxième livre, du début du XVe siècle, est le Lectionnaire de la Sainte-Chapelle sur lequel on a vu une miniature représentant la naissance de Jésus Christ et ornée de décors dans les marges avec à nouveau les emblèmes du duc de Berry. Ces 4 volumes sont visibles en ligne : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8454017z.r=Lectionarium%20ad%20usum%20Sanctae%20Capellae%20Bituricensis Les autres sont visibles sur http://www.culture.gouv.fr/documentation/enlumine/fr/BM/bourges.htm Le troisième livre (fin XIVe siècle) est un dictionnaire religieux et scientifique intitulé Catholicon et écrit par Jean de Gênes. En classe, nous avons transcrit son ex-libris superbement calligraphié par Jean Flamel (peut-être parent du célèbre alchimiste Nicolas Flamel), le secrétaire du duc Jean : Cest le Grant Catholicum escript de lettre de forme, lequel est a Jehan, filz de roy de France, duc de Berry et d'Auvergne, conte de Poitou, d'Estampes, de Bouloingne et d'Auvergne. Signé Flamel. Le quatrième manuscrit était le plus ancien, du XIIe siècle, intitulé Sentences de Pierre Lombard. On arrive mieux à déchiffrer ses lettres carolines. On y a remarqué les réglures tracées par les copistes et surtout la grande lettre S que l'on appelle une initiale ou une lettrine. Le cinquième livre qui date du XIIIe siècle, présente les Epîtres de Paul glosées, c'est à dire les lettres de Paul (colonne avec l'écriture la plus grosse) commentées. Les lettrines sont historiées avec une représentation de saint Paul au milieu du P enluminé à la feuille d'or. Le sixième manuscrit est un livre de médecine de Galien, intitulé Oeuvres, du XIVe siècle, qui présente des peintures d'hommes en train de cuisiner ou de préparer des potions.
Nous avons été impressionnés par la taille des livres, par le fait que le duc Jean les avait feuilletés, par le travail minutieux des copistes et des peintres, par la brillance de l'or et la beauté des couleurs dus à une bonne conservation. Merci à M. Tranchida de nous avoir permis d'admirer ces trésors. Ils seront exposés, à la bibliothèque patrimoniale des Quatre-Piliers, en 2016, pour commémorer les 600 ans de la mort du duc Jean de Berry. Le duc Jean de Berry, né Jean de France en 1340, était le fils cadet du roi de France Jean II le Bon. Son frère aîné, Charles V, hérita du trône. Pour consoler Jean de France de ne pas devenir roi, il devint duc de Berry, d'Auvergne et comte du Poitou. Il avait ainsi autorité sur un vaste territoire sur lequel il a fait construire 17 palais ou châteaux : par exemples un château à Mehun-sur-Yèvre, un palais et une sainte-chapelle à Riom la capitale de l'Auvergne, un palais et un château à Poitiers, un palais et une sainte-chapelle à Bourges qui devient alors la capitale de son vaste duché. Le palais de Bourges est construit vers 1370 par les architectes du Louvre. Le duc Jean fait venir à Bourges les plus grands artistes (sculpteurs, peintres,...) qui font de Bourges la capitale artistique de l'époque. De l'extérieur, on reconnaît le style gothique aux fenêtres avec des arcs brisés et des lobes. Le haut du bâtiment a été restauré suite à plusieurs incendies, notamment celui de 1693.
A gauche en entrant, nous avons découvert la "petite" salle d'apparat, dite salle du duc Jean, avec ses trois cheminées et ses 10 m de hauteur. Elle est aujourd'hui décorée par une immense tapisserie du début du XXe siècle qui représente le duc Jean recevant des présents, entouré d'animaux exotiques (il possédait une ménagerie et adorait les chiens), d'ours et de cygnes. C'est deux derniers sont ses emblèmes formant un rébus "ours-cygne" qui fait peut-être référence à son amoureuse Ursine. Il était pourtant marié à Jeanne d'Armagnac dont on peut voir la statue en prière dans l'église basse de cathédrale, faisant face au priant du duc Jean. A sa mort en 1387, il épouse la très jeune (14 ans) Jeanne de Boulogne, duchesse d'Auvergne, comme le montre l'écu au tympan d'une des portes de la salle du Duc Jean sur lequel le blason est à moitié d'Auvergne et de fleurs de lys. Un autre écu représente les armes de Bourges avec 3 moutons et des fleurs de lys. Ces portes sont décorées d'arcs brisés et de choux frisés gothiques mais ont été restaurées. Rien n'est de l'époque du duc Jean à part les murs et le haut du manteau de la cheminée. La grande cheminée a été restaurée, les stalles de chanoines datent du XVIIe siècle et proviennent de la cathédrale, le panneau d'armes est du XVII-XVIIIe siècles, le lustre en fer forgé est du XXe siècle, tout comme les tapisseries. Le duc Jean de Berry est mort en 1416. Son palais est ensuite occupé par le dauphin Charles qui est venu se réfugier à Bourges pendant la guerre de Cent ans. Lorsqu'il devient le nouveau roi de France sous le nom de Charles VII, le palais ducal devient le palais royal et Bourges la nouvelle capitale du royaume. Le duc Jean de Berry était le prince des bibliophiles et a commandé de très nombreux manuscrits enluminés: les Belles heures, les Grandes heures et le plus célèbre, les Très riches heures du duc de Berry. Ce manuscrit enluminé est le plus célèbre de tout le Moyen Age occidental. Il commence par un calendrier avec douze miniatures à pleine page qui représentent les activités des paysans et des seigneurs tout au long de l'année. Le duc Jean s'y fait représenter. Jeudi prochain nous aurons la chance et le privilège d'admirer six de ses manuscrits enluminés conservés à la bibliothèque des Quatre-Piliers à Bourges. L'archevêque de Bourges était aussi le primat d'Aquitaine ce qui lui donnait l'autorité spirituelle sur le quart sud-ouest de la France. Il ne pouvait pas se contenter de sa petite cathédrale romane (voir article précédent). Il décide alors de faire construire une immense cathédrale pour montrer sa puissance.
Les fenêtres sont décorées de vitraux dont les plus anciens, dans le déambulatoire, datent du début du XIIIe siècle et sont à dominante rouge et bleu. Comme les vitraux coûtaient très chers, une partie a été payée par des corps de métier qui sont représentés dans le bas, comme par exemple les maçons. Les vitraux décorant les chapelles latérales datent plutôt du XVe et XVIe siècles et ont été payés par les familles ayant fait construire ces chapelles comme par exemple ce magnifique vitrail de l'Annonciation (photo de droite) commandé par Jacques Cœur. Ils présentent toute la palette des couleurs et sont plus clairs que ceux du XIIIe siècle. Il existe une différence entre les vitraux du chœur et ceux de la nef. On retrouve cette coupure à l'extérieur dans la forme des fenêtres. C'était une façon de marquer la séparation du chœur de la nef parce qu'il n'y pas de transept à Bourges. C'est une des particularités de notre cathédrale qui en a aussi une autre : c'est une des rares églises au monde à avoir cinq nefs qui débouchent sur cinq portails. Ces portails sont majestueux et magnifiquement sculptés. Le plus célèbre est le portail central qui raconte le Jugement dernier au registre du milieu : à gauche les élus qui vont au paradis rejoindre saint Pierre et Abraham, au centre saint Michel qui pèse les âmes et à droite les damnés qui vont bruler dans le chaudron des enfers, lui-même avalé par le léviathan. |